mardi 25 novembre 2014

Récit  10

Le collet remonté de G.:

Je me souviens de G. en quatrième secondaire. Elle était toujours tirée à quatre épingles. Elle portait très souvent des habits trois-pièces pour venir à l’école, presque toujours bleus mais de différents tons. J’avais toujours l’impression qu’elle était habillée pour aller à un mariage… ou un enterrement.

Elle était assise devant moi pendant le cours d’histoire. Un matin, elle est arrivée habillée d’un de ses fameux complets, mais ce qu’il y avait de différent, c’est que le collet de sa chemise était complètement remonté.

Étant assis derrière elle, je voyais cet énorme collet relevé -- les chemises de ces années-là avaient de gigantesques collets -- et je décidais sur-le-champ de le rebaisser avant que quelqu’un ne s’aperçoive de la « grave erreur »; son collet s’était levé sans qu’elle le sache! Donc, je me suis penché sur mon bureau en tendant le bras vers son grand collet et lentement je l’ai replié dans sa position initiale avec ma main. Je me suis rassis sur ma chaise avec la satisfaction du devoir accompli.

G. se retourna alors en me jetant un vif coup d’œil interrogateur et, devant la classe silencieuse, releva son collet en marmonnant que c’était comme ça qu’elle le voulait.

Ô honte! Moi qui n’avais jamais osé adresser la parole à cette fille, que secrètement j’aimais bien, voilà qu’elle venait de me bafouer devant toute la classe. (En tout cas, devant moi-même!) Je me sentis alors en disgrâce devant elle pour le reste de l’année; le petit con qui ne savait pas que la mode était au collet relevé!

Le plus ironique est que cinq ou six ans plus tard, je me suis mis à porter les collets, non de mes chemises, mais de tous mes manteaux relevés.



G. je ne t’ai jamais oublié; encore aujourd’hui, chaque fois que je relève un collet de manteau, j’ai une petite pensée pour toi…







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